L’inositol est une substance semblable à une vitamine qui a longtemps été classée dans le complexe des vitamines B. Suite à la découverte que le corps humain peut synthétiser lui-même l’inositol à partir du glucose, l’inositol n’est plus considéré aujourd’hui comme une vitamine, mais considéré comme un vitaminoïde, une substance qui doit être considérée comme un nutriment essentiel sous certaines conditions.

➠ Physiologie

Le corps humain synthétise l’inositol à raison d’environ 4 g par jour principalement dans les cellules du rein (Dinicola et al. 2017) à partir du glucose-6-phosphate. Le foie et le cerveau synthétisent également des dérivés de l’inositol, bien qu’en quantités bien inférieures à celles des reins. Il est important de noter que dans le cerveau, les taux d’inositol atteignent des concentrations 10 à 15 fois supérieures à celles du sang, et l’absorption de myo-inositol par la circulation systémique est limitée. Certains cofacteurs enzymatiques (NADPH, Mg²⁺) doivent être présents en quantité suffisante. Ainsi, une carence en l’un ou l’autre peut entraîner une carence en inositol. 

L’inositol existe sous 9 isomères différents. Tous ces composés d’inositol ne se distinguent que par la disposition spatiale de leurs atomes. Les deux formes d’inositol les plus connues sont
– le myo-inositol,
– le D-chiro-inositol
Un bon rapport myo-Ins/D-chiro-Ins détermine le bon état des organes et des tissus, tandis qu’un déséquilibre des taux d’inositol ou leur déplétion dans les tissus périphériques peuvent être à l’origine de pathologies. L’inositol est essentiel à la croissance et à la survie normales des cellules, au développement et au fonctionnement des nerfs périphériques, à l’ostéogenèse et à la reproduction.
🔗 Int J Mol Sci. 2021 – Inositols: From Established Knowledge to Novel Approaches

➥ Sources et besoins

L’inositol se trouve naturellement dans certains aliments, notamment les fruits (agrumes, melons), les légumes (haricots, choux, carottes), les céréales complètes, les noix et graines. L’apport alimentaire moyen d’inositol est d’environ 0,5 à 1,0 g/jour. Lorsque la production endogène de myo-inositol est insuffisante pour répondre aux besoins biologiques humains, un apport adéquat en inositol, soit par le biais d’aliments spécifiques et/ou de suppléments, devient nécessaire. Commercialisés sous forme d’inositol libre (souvent myo-inositol), les suppléments sont utilisés pour améliorer certains troubles psychiatriques ou métaboliques (ex : syndrome des ovaires polykystiques). Ces composés jouent un rôle central dans les mécanismes de signalisation cellulaire, notamment dans la transduction des signaux hormonaux (insuline, FSH, TSH) et la régulation de certaines voies métaboliques essentielles.
🔗 Front Pharmacol. 2019 – Myo-Inositol and Its Derivatives: Their Emerging Role in the Treatment of Human Diseases

➥ Fonctions et mécanismes d’action

Sur le plan physiologique, l’inositol participe :
① au maintien de l’intégrité membranaire
② à la modulation de la sensibilité à l’insuline et du métabolisme glucidique,
③ à la fonction ovarienne et à la maturation ovocytaire.
④ à la neurotransmission,
⑤ aux effets sur le métabolisme lipidique

① Constitution des phosphoinositides membranaires

L’inositol est incorporé sous forme de phosphatidylinositol dans les membranes cellulaires. Par phosphorylation, il donne naissance à des phosphoinositides (PI, PIP, PIP₂), qui servent de substrats aux phospholipases C et D, générant des seconds messagers intracellulaires tels que l’inositol 1,4,5-trisphosphate (IP₃) et le diacylglycérol (DAG). Ces messagers régulent la libération du calcium intracellulaire et l’activation de protéines kinases impliquées dans de nombreuses réponses cellulaires.

② Modulation de la signalisation insulinique

L’inositol et ses dérivés (notamment l’inositol-phosphoglycanes) agissent comme médiateurs secondaires de l’action de l’insuline. Ils participent à la translocation des transporteurs de glucose (GLUT4) vers la membrane cellulaire, améliorant ainsi l’absorption du glucose et la sensibilité à l’insuline.

③ Régulation hormonale et fonction ovarienne

Dans les cellules de la granulosa, le myo-inositol est impliqué dans la signalisation de la FSH (hormone folliculo-stimulante), favorisant la maturation folliculaire et ovocytaire. Le D-chiro-inositol, autre isomère physiologique, intervient dans la signalisation de l’insuline au niveau ovarien et hépatique.

④ Rôle neurochimique

L’inositol intervient dans le métabolisme des phosphatidylinositols neuronaux, influençant la transmission synaptique. Il est supposé moduler la neurotransmission sérotoninergique et dopaminergique, qui jouent un rôle clé dans l’humeur, l’anxiété et les fonctions cognitives. L’inositol peut être un complément utile pour les patients souffrant de divers troubles psychiatriques. Le myo-inositol est transformé en acide glucuronique par l’action d’une myo-inositol oxygénase, puis l’acide D-glucuronique ou glucuronamide est transformé en D-glucuronolactone. Cet ingrédient intègre surtout les boissons énergisantes, et son effet se rapproche de celui de la caféine, dans le but de contrer la fatigue et apporter une sensation de bien-être.

⑤ Effets sur le métabolisme lipidique

Par l’intermédiaire des voies de signalisation dépendantes des phosphoinositides, l’inositol participe à la régulation de l’homéostasie lipidique et à la prévention de l’accumulation excessive de triglycérides dans le foie. Le déficit en myo-inositol entraîne une forte accumulation de triacylglycérol, de cholestérol et de lipides non estérifiés dans le foie et la formation de stéatose hépatique ( Burton et Wells, 1974 ; Hayashi et al., 1974a ;  Hayashi et al., 1974b ).

L’inositol est très important pour les performances sportives car il :
1. améliore l’oxydation du glucose.
2. achemine le glucose vers les muscles squelettiques.
3. améliore la synthèse du glycogène.
4. améliore la sensibilité à l’insuline.
5. améliore la combustion des graisses.
6. achemine la créatine vers les muscles.
7. achemine le calcium vers les os.

Qu’est-ce qui épuise l’inositol dans l’organisme ?
1. la carence en magnésium
2. la carence en NAD+
3. les taux élevé de glucose
4. le manque de sel (sodium)
5. la résistance à l’insuline
6. le café/caféine

La voie des phosphoinositides (IPs)

Un phosphatidylinositol est un phospholipide, constituant des membranes cellulaires. Il se trouve préférentiellement sur la face interne de la bicouche lipidique.

Les phosphoinositides (IPs) sont des dérivés du phosphatidylinositol où l’anneau inositol est phosphorylé sur une ou plusieurs positions hydroxyle (en 3, 4 ou 5). Les phosphoinositides sont des lipides minoritaires présents dans les membranes cellulaires, mais qui jouent un rôle clé en servant de plateformes pour le recrutement de protéines spécifiques et comme précurseurs de seconds messagers.

Déterminer si la voie phosphoinositide est déficiente ou suractivée dans un contexte clinique ou de recherche est complexe, car cette voie est dynamique, très régulée, et varie selon les tissus et états pathologiques.

Une carence en inositol réduit la signalisation phosphoinositide, ce qui perturbe la communication neuronale via plusieurs neuromédiateurs. Cela peut affecter la régulation de l’humeur, la mémoire, et d’autres fonctions cérébrales. On pense que dans les troubles bipolaires, la signalisation via le système phosphoinositide est perturbée, peut-être hyperactive. Ainsi, des signaux de myo-inositol plus élevés ont été détectés dans le cerveau de patients atteints de trouble bipolaire pendant la phase maniaque tandis qu’inversement, des taux significativement plus faibles de myo-inositol ont été identifiés dans le cortex frontal des patients atteints de trouble bipolaire pendant la phase dépressive. La régulation/modulation (à la baisse en évitant toutefois une carence trop importante) de ce système par le lithium permettrait donc de rétablir un équilibre et de réduire les épisodes maniaques et dépressifs.
Le lithium et l’inositol ont des effets antagonistes sur la disponibilité de l’inositol libre et donc sur la signalisation phosphoinositide IP₃/DAG :
– Inositol → alimente la signalisation IP₃/DAG
– Lithium → freine la signalisation IP₃/DAG quand elle est théoriquement excessive (phase maniaque)

Au niveau cutanée, le lithium en inhibant la synthèse d’inositol provoque :
→ perturbation de la signalisation IP₃ / DAG dans les cellules cutanées et follicules pileux
→ troubles de la kératinisation, inflammation cutanée, anomalies du sébum, perturbation du cycle capillaire.
Du point de vue d’un trichologue, la chute des cheveux est l’effet secondaire le plus fréquent du lithium

➠ Potentiel thérapeutique

Il est admis que les anomalies du métabolisme de l’inositol sont impliquées dans la physiopathologie d’une variété de contextes cliniques, notamment
– la neuropathie diabétique,
– le diabète gestationnel,
– le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK),
– la dysplasie bronchopulmonaire, le syndrome de détresse respiratoire aiguë,
– le trouble bipolaire, etc.
– la fonction thyroïdienne.
Par ailleurs, l’inositol agit en activant la synthèse du collagène I au niveau des fibroblastes. Sur le plan biologique, il régule la voie Diacylglycérol/Protéine kinase C (DAG/PKC) et protège la peau du photovieillissement.  
🔗 Front Pharmacol. 2019 – Myo-Inositol and Its Derivatives: Their Emerging Role in the Treatment of Human Diseases

🩺 Usages thérapeutiques (et niveau de preuve)

Indication	Effet observé	Preuve scientifique
SOPK	Cycles réguliers, ovulation ↑	Élevée
Troubles anxieux	Symptômes ↓	Modérée
TOC	Symptômes ↓	Modérée
Syndrome métabolique / Diabète T2	Glycémie et lipides ↓	Modérée
Dépression	Amélioration légère	Faible à modérée
Fertilité masculine	Spermatozoïdes de meilleure qualité	Faible à modérée

Le myo-inositol pourrait être envisagé chez les patients présentant une résistance à l’insuline, un syndrome métabolique, un diabète, un SOPK.

➥ Les troubles de la fertilité

① le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK)

Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est un trouble endocrinien et métabolique courant cause majeure d’infertilité chez la femme. Le myo-inositol et le D-chiro-inositol, seuls ou en association, améliorent la sensibilité à l’insuline et favorisent la régularisation des cycles menstruels. Plusieurs essais cliniques randomisés et méta-analyses montrent un bénéfice sur l’ovulation, la maturation ovocytaire et les taux de grossesse, avec un profil de tolérance favorable. Le rapport optimal myo-inositol/D-chiro-inositol (souvent 40:1) semble important pour maximiser l’efficacité et limiter les effets paradoxaux.
🔗 Endocrine. 2025 – Comparison of metformin with inositol versus metformin alone in women with polycystic ovary syndrome: a systematic review and meta-analysis of randomized controlled trials
🔗 Clin Exp Reprod Med. 2024 – Systematic Review of the roles of Inositol and Vitamin D in improving fertility among patients with Polycystic Ovary Syndrome

② le spermogramme

Le myo-inositol peut contribuer à améliorer la fertilité masculine en améliorant la qualité, la motilité, et la morphologie des spermatozoïdes, en agissant sur la fonction mitochondriale, en réduisant le stress oxydatif, et en régulant les hormones.
🔗 Food Sci Nutr. 2024 – The effect of Myo-inositol on improving sperm quality and IVF outcomes: A systematic review and meta-analysis

➥ Le syndrome métabolique

Le diabète de type 2 et le diabète gestationnel
Les mécanismes d’action, soutenus par des données expérimentales, semblent impliquer une amélioration de la tolérance au glucose, une diminution de la résistance à l’insuline avec le D-chiro-inositol.
🔗 Diabetes Obes Metab. 2025 – Efficacy of myo-inositol and zinc on insulin resistance in a paediatric population with obesity
🔗 Arch Gynecol Obstet. 2024 – Effect of dietary myo-inositol supplementation on the insulin resistance and the prevention of gestational diabetes mellitus: an open-label, randomized controlled trial
🔗 Open Heart. 2022 – Myo-inositol for insulin resistance, metabolic syndrome, polycystic ovary syndrome and gestational diabetes
🔗 Nutrients. 2022 – Inositol Nutritional Supplementation for the Prevention of Gestational Diabetes Mellitus: A Systematic Review and Meta-Analysis of Randomized Controlled Trials
🔗 Int J Endocrinol. 2016 – The Effectiveness of Myo-Inositol and D-Chiro Inositol Treatment in Type 2 Diabetes
🔗 Mol Med. 2010 – D-chiro-inositol glycans in insulin signaling and insulin resistance

La supplémentation en inositol peut également aider à soutenir la perte de poids : certaines données probantes montrent qu’elle peut réduire l’indice de masse corporelle (IMC) chez les personnes en surpoids ou obèses . La supplémentation en inositol pourrait également réduire la pression artérielle, les triglycérides, le cholestérol total et le cholestérol LDL. Cependant, les effets confondants de l’apport alimentaire et de l’activité physique – facteurs qui influencent indépendamment la perte de poids, les lipides sanguins et la pression artérielle – n’ont pas été clairement contrôlés dans de nombreuses études. Par conséquent, il est nécessaire de réaliser d’autres essais contrôlés randomisés examinant l’effet direct de l’inositol sur ces résultats.
🔗 Int J Mol Sci. 2017 – Nutritional and Acquired Deficiencies in Inositol Bioavailability. Correlations with Metabolic Disorders

➥ Les troubles anxieux et troubles obsessionnels-compulsifs (TOC)

Des études cliniques suggèrent un effet anxiolytique et une réduction de la symptomatologie dans le TOC, probablement via la modulation des voies sérotoninergiques. Les résultats restent toutefois hétérogènes, et l’utilisation se fait principalement en complément des traitements de référence (thérapies cognitivo-comportementales, ISRS). Des niveaux anormaux de myo-inositol, de glutamate et de glutamine ont été retrouvés dans le cerveau des patients atteints de trouble dépressif majeur.
🔗 Curr Issues Mol Biol. 2023 – Neurobiology and Applications of Inositol in Psychiatry: A Narrative Review
🔗 Biol Psychiatry Cogn Neurosci Neuroimaging. 2017 – Myo-inositol, Glutamate, and Glutamine in the Prefrontal Cortex, Hippocampus, and Amygdala in Major Depression
🔗 Bipolar Disord. 2005 – Bipolar disorder and myo-inositol: a review of the magnetic resonance spectroscopy findings
🔗 J Clin Psychopharmacol. 2001 – Double-blind, controlled, crossover trial of inositol versus fluvoxamine for the treatment of panic disorder
🔗 Am J Psychiatry. 1996 – Inositol treatment of obsessive-compulsive disorder

➥ Les maladies respiratoires

Le myo-inositol montre des effets biologiques plausibles (anti-inflammatoire, amélioration du surfactant, mucolyse) et des résultats prometteurs en préclinique et dans des petites études cliniques pour plusieurs pathologies pulmonaires (prévention du cancer bronchique, CF, bronchiectasies, BPCO, fibrose). Le myo-inositol (MYO), osmolyte intracellulaire majeur, peut recruter de l’eau, augmentant ainsi l’hydratation du mucus et favorisant la clairance mucociliaire.
🔗 Int J Mol Sci. 2025 – The Therapeutic Potential of Myo-Inositol in Managing Patients with Respiratory Diseases

➥ Les maladies de la thyroïde

La combinaison myo-inositol + sélénium semble montrer des effets prometteurs sur certains aspects de l’hypothyroïdie légère ou auto-immune en entraînant une diminution de la TSH et une augmentation de la T4. 
🔗 Expert Rev Endocrinol Metab. 2024 – Investigating the effect of combined use of selenium and Myo-inositol supplements on thyroid function and autoimmune characteristics in thyroid disorders: a systematic review and meta-analysis
🔗 Front Endocrinol (Lausanne). 2021 – The Role of Inositol in Thyroid Physiology and in Subclinical Hypothyroidism Management

👉 L’inositol en résumé

L’inositol est une molécule essentielle à de nombreuses fonctions biologiques. Sa supplémentation montre un intérêt clinique confirmé dans le SOPK et prometteur dans d’autres troubles métaboliques, psychiatriques et endocriniens.

© Rémy Honoré

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