Les antidépresseurs

pour les troubles anxieux et les troubles de l'humeur

Les antidépresseurs

1280 720 Rémy Honoré

La dépression est un trouble complexe qui résulte d’une interaction multifactorielle entre des éléments biologiques, psychologiques et environnementaux. La recherche en neurosciences a permis de mieux cerner la diversité biologique des formes de dépression, qui ne se limitent pas à un simple déséquilibre chimique classique. On sait aujourd’hui que plusieurs sous-types biologiques existent, avec des mécanismes distincts.

Les antidépresseurs, dit ISRS, qui ciblent la sérotonine sont largement utilisés pour traiter les troubles de l’anxiété et de l’humeur. D’autres neurotransmetteurs (comme la noradrénaline et la dopamine) sont également des cibles de traitement pour les troubles évoquées ci-dessus ; cependant, les thérapies qui affectent la sérotonine sont souvent considérées comme première intention dans la gestion pharmacologique, en plus d’autres interventions telles que les changements de mode de vie, l’exercice physique et la psychothérapie. La sérotonine est capable de moduler les systèmes glutamatergique (excitateur) et GABAergique (inhibiteur), deux systèmes clés dans l’équilibre neuronal. Les médicaments ISRS aideraient à rééquilibrer la balance glutamate-GABA, ce qui contribueraient à leurs effets anxiolytiques et antidépresseurs.
🔗 Neuroimage. 2021 – Effects of SSRI treatment on GABA and glutamate levels in an associative relearning paradigm
🔗 Curr Neuropharmacol. 2006 – Serotonin as a Modulator of Glutamate- and GABA-Mediated Neurotransmission: Implications in Physiological Functions and in Pathology


Les inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine (ISRS) et les inhibiteurs du recaptage de la sérotonine-norépinéphrine (IRSN) sont des traitements pharmacologiques de première intention pour les personnes souffrant de :
troubles anxieux
troubles de l’humeur (irritabilité, dépression)

➠ Les ISRS

Parmi les médicaments dits ISRS, on retrouve la sertraline (Zoloft), la fluvoxamine (Floxyfral), la fluoxétine (Prozac), la paroxétine (Deroxat), le citalopram (Seropram) et l’escitalopram (Seroplex). Le choix de l’un de ces médicaments est propre au thérapeute, bien que certaines études montrent une supériorité de l’escitalopram par rapport aux autres médicaments de la même classe.
🔗 Int J Psychiatry Clin Pract. 2020 – Selective serotonin reuptake inhibitors in major depression disorder treatment: an umbrella review on systematic reviews
🔗 Int Clin Psychopharmacol. 2014. A comparative review of escitalopram, paroxetine, and sertraline: Are they all alike?
🔗 J Psychiatry Neurosci. 2006 – Efficacy of escitalopram in the treatment of major depressive disorder compared with conventional selective serotonin reuptake inhibitors and venlafaxine XR: a meta-analysis

➥ Mécanisme d’action

Un mode d’action toujours inconnu

Bien que les antidépresseurs ISRS (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) soient utilisés depuis plus de 40 ans pour traiter la dépression, leur mécanisme d’action exact reste encore partiellement inconnu. Traditionnellement, on explique leur effet principal par l’augmentation de la sérotonine dans le cerveau grâce à l’inhibition de sa recapture. Toutefois, il est désormais reconnu que leur action dépasse ce seul mécanisme, et ces médicaments ont également d’autres effets, notamment des propriétés anti-inflammatoires et neuroprotectrices.

Des données récentes indiquent que les ISRS exercent également des effets anti-inflammatoires et neuroprotecteurs, en modulant notamment la production de cytokines pro-inflammatoires. Un mécanisme potentiel implique l’inhibition de l’indoleamine 2,3-dioxygénase (IDO), enzyme clé du catabolisme du tryptophane vers la voie kynurénine-NAD+. La réduction de l’activité d’IDO augmenterait la disponibilité du tryptophane pour la synthèse de sérotonine, tout en diminuant la production de métabolites neurotoxiques et de NAD+.

Cette modulation métabolique pourrait contribuer à certains effets indésirables observés en début de traitement, tels que la fatigue et l’anhédonie, possiblement liées à une baisse relative de dopamine et d’adénosine triphosphate (ATP). En conséquence, une évaluation des statuts en niacine (vitamine B3), précurseur du NAD+, pourrait être pertinente chez les patients présentant une dépression résistante ou une mauvaise réponse aux ISRS.

Par ailleurs, il a été démontré que les ISRS induisent l’upregulation de la tryptophane hydroxylase (TPH), l’enzyme limitante dans la biosynthèse de la sérotonine, cohérent avec une augmentation du flux métabolique vers la production de sérotonine.

Enfin, l’augmentation prolongée de la neurotransmission sérotoninergique favorise la synthèse de facteurs neurotrophiques, notamment le facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF), dont la restauration est associée à l’amélioration clinique des troubles dépressifs.
🔗 J Clin Med. 2022 – Identification of Genetic Variations in the NAD-Related Pathways for Patients with Major Depressive Disorder: A Case-Control Study in Taiwan
🔗 Med Hypotheses. 2015 – Antidepressants may lead to a decrease in niacin and NAD in patients with poor dietary intake
🔗 In Vivo. 2014 – Indoleamine 2,3-dioxygenase and immune changes under antidepressive treatment in major depression in females
🔗 Mol Pharmacol. 2002 – Up-regulation of tryptophan hydroxylase expression and serotonin synthesis by sertraline

Effets indésirables

Les effets indésirables des ISRS, particulièrement présents en début de traitement, comprennent l’hyponatrémie, un dysfonctionnement sexuel (diminution de la libido, anorgasmie), une fatigue chronique avec un besoin de sommeil augmenté en journée, un syndrome d’apathie, un émoussement émotionnel, et une prise de poids. L’association d’AINS et d’ISRS multiplie le risque de saignement digestif par six.
Les ISRS sont moins cardiotoxiques que de nombreux antidépresseurs de première génération, mais il existe encore des preuves que tous les ISRS, et plus spécifiquement le citalopram et l’escitalopram, favorise un allongement de l’intervalle QT et prédisposent aux troubles du rythme, particulièrement en début de traitement.
🔗 rfcrpv. 2021 – inhibiteurs de recapture de la serotonine et risque hemorragique
🔗 J Clin Psychiatry. 2014 – Meta-analysis of selective serotonin reuptake inhibitor-associated QTc prolongation

Le syndrome d’apathie

Le syndrome d’apathie est une perte primaire de motivation indépendante de toute déficience intellectuelle, détresse émotionnelle ou diminution de la conscience. Les symptômes d’apathie, tels que la perte d’intérêt, de la motivation, de l’initiation à l’action, de l’anergie, peuvent être attribués à tort à des troubles dépressifs. Il existe ainsi un chevauchement considérable dans les présentations cliniques de l’apathie et de la dépression. L’une des raisons pour lesquelles il est important de différencier le syndrome d’apathie de la dépression est que le syndrome d’apathie a été signalé chez un certain nombre de patients traités par des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine au cours de la dernière décennie.
🔗 Acta Neuropsychiatr. 2023 – Apathy associated with antidepressant drugs: a systematic review
🔗 Vertex. 2023 – Embotional Blunting or apathy by SSRI? A sistematic review about their emotional effects
🔗 Medecine (Baltimore). 2020 – Selective serotonin reuptake inhibitors-associated apathy syndrome: A cross sectional study
🔗 Ann Pharmacother. 2012 – Reversal of SSRI-associated apathy syndrome by discontinuation of therapy
🔗 Ann Gen Psychiatry. 2007 – Selective serotonin reuptake inhibitor use associates with apathy among depressed elderly: a case-control study

L’émoussement émotionnel

L’un des effets indésirables principaux induit par les ISRS, qui conduit majoritairement à l’arrêt du traitement, est un symptôme “d’émoussement émotionnel”. L’émoussement émotionnel, qui se manifeste à différents degrés, est rapporté par près de la moitié des patients déprimés sous antidépresseurs ISRS. Cet état décrit un affect indifférent et insensible, une incapacité à ressentir des émotions positives ou négatives. L’émoussement émotionnel signifie que les sentiments et les émotions sont si émoussés que le patient ne se sent ni bien ni mal. Les vagues accablantes de tristesse peuvent ainsi parfois être remplacées par une inertie émotionnelle dans laquelle le patient ne peut ni pleurer ni partager un vrai rire du ventre. Le patient peut ainsi :
– être moins capable de rire ou de pleurer même lorsque cela est approprié,
– avoir moins d’empathie pour les autres,
– avoir une perte de motivation et de dynamisme,
– ne pas être en mesure de répondre avec le même niveau de plaisir que normalement,
L’émoussement émotionnel s’accompagne souvent d’autres symptômes tels qu’un ralentissement de la pensée, une diminution de la libido voire une perte de concentration.
🔗 Neuropsychopharmacol Rep. 2024 – A web-based survey on the occurrence of emotional blunting in patients with major depressive disorder in Japan: Patient perceptions and attitudes
🔗 Front Psychiatry. 2021 – Emotional Blunting in Patients With Major Depressive Disorder: A Brief Non-systematic Review of Current Research
🔗 Psychiatry (Edgmont). 2010 – SSRI-Induced Indifference
🔗 Int J Neuropsychopharmacol. 2002 – Emotional blunting associated with SSRI-induced sexual dysfunction. Do SSRIs inhibit emotional responses? – 2002/06

Un mécanisme qui pourrait expliquer ce syndrome est une diminution de la synthèse ou de la libération d’histamine responsable des émotions.
La vortioxétine (Brintellix) est un nouveau médicament « multi-modal » qui pourrait être utilisé pour résoudre les effets indésirables des ISRS car de nombreuses études ont rapporté des améliorations sur les dysfonctionnement de la libido et de l’émoussement émotionnel, probablement grâce à son action pro-histaminergique.
🔗 Int J Neuropsychopharmacol. 2024 – Emotional Blunting in Depression in the PREDDICT Clinical Trial: Inflammation-Stratified Augmentation of Vortioxetine With Celecoxib
🔗 J Clin Med. 2024 – Switching to Vortioxetine in Patients with Poorly Tolerated Antidepressant-Related Sexual Dysfunction in Clinical Practice: A 3-Month Prospective Real-Life Study
🔗 J Affect Disord. 2021- Effectiveness of Vortioxetine on Emotional Blunting in Patients with Major Depressive Disorder with inadequate response to SSRI/SNRI treatment
🔗 J Sex Med. 2019 – Paroxetine, but not Vortioxetine, Impairs Sexual Functioning Compared With Placebo in Healthy Adults: A Randomized, Controlled Trial
🔗 CNS Spectr. 2020 – Clinical implications of directly switching antidepressants in well-treated depressed patients with treatment-emergent sexual dysfunction: a comparison between vortioxetine and escitalopram
🔗 Prog Neuropsychopharmacol Biol Psychiatry. 2016 – Histamine may contribute to vortioxetine’s procognitive effects; possibly through an orexigenic mechanism

Autres effets indésirables

Une anxiété possiblement accrue dans les premiers jours d’utilisation
Une anxiété accrue est initialement possible. De la somnolence, des étourdissements, vertiges, des maux de tête, des nausées sont également possibles.

Une diminution de la libido, une anorgasmie, une rétention urinaire et une difficulté d’éjaculation chez les hommes
L’augmentation forte de la sérotonine a tendance à altérer considérablement la fonction sexuelle. Chez les hommes, cela peut entraîner une dysfonction érectile, un orgasme retardé ou une anorgasmie. Chez les femmes, cela peut également entraîner une sécheresse vaginale ou une anorgasmie. L’excitation et l’orgasme sont basées sur l’activité du système nerveux autonome avec l’action de l’histamine, de l’acétylcholine et de la noradrénaline. Le dysfonctionnement peut être léger ou grave, avec une perte de fonctionnement totale.
Des cas de rétention urinaire ont également été décrits dans la littérature scientifique.
Ann Gen Psychiatry. 2023 – Estimating the risk of irreversible post-SSRI sexual dysfunction (PSSD) due to serotonergic antidepressants
Sex Med Rev. 2022 – Post-SSRI Sexual Dysfunction (PSSD): Biological Plausibility, Symptoms, Diagnosis, and Presumed Risk Factors

Un syndrome de sécrétion d’hormone antidiurétique inappropriée (SIADH) avec hyponatrémie
La vasopressine (ADH) est une hormone fabriquée dans le cerveau par l’hypothalamus et sécrétée par la glande hypophyse. Cette neuro-hormone est connue plus spécifiquement pour ses effets antidiurétiques en diminuant l’excrétion d’eau par les reins. Par son action, une quantité d’eau plus importante est retenue dans l’organisme, ce qui dilue le taux de sodium dans l’organisme. Un faible taux de sodium est appelé hyponatrémie. Le syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique (SIADH) est le mécanisme le plus souvent responsable d’hyponatrémie de dilution et ses étiologies sont multiples mais se rencontre fréquemment avec les antidépresseurs ISRS (jusqu’à 30% pour certains médicaments). L’hyponatrémie est considérée comme un événement indésirable important des traitements antidépresseurs en raison de son impact potentiellement grave sur l’état de santé général des patients. L’hyponatrémie induite par le SIADH est une complication grave mais probablement très sous-estimée du traitement par ISRS.
🔗 Eur Psychiatry. 2024 – The risk of antidepressant-induced hyponatremia: A meta-analysis of antidepressant classes and compounds
🔗 J Family Med Prim Care. 2017 – Severe hyponatremia associated with escitalopram

Des anomalies métaboliques
Le traitement par ISRS est associé à une prise de poids et une dyslipidémie. Au delà de la prise de poids, les ISRS pourraient accélérer la transition d’un état d’insulinorésistance à un diabète manifeste. Les ISRS diminuent la synthèse ou libération de la dopamine, et cela pourrait aussi provoquer une akathisie chez certains patients, en particulier les patients âgés qui peuvent ne pas avoir beaucoup de réserve de dopamine au départ.
🔗 Healthcare (Basel). 2022 – Lipid Biomarkers in Depression: Does Antidepressant Therapy Have an Impact?
🔗 Acta Pharmacol Sin. 2018 – Fluoxetine induces lipid metabolism abnormalities by acting on the liver in patients and mice with depression
🔗 J Clin Psychopharmacol. 2016 – Metabolic Abnormalities Related to Treatment With Selective Serotonin Reuptake Inhibitors in Patients With Schizophrenia or Bipolar Disorder

Le syndrome sérotoninergique
Le syndrome sérotoninergique est un événement indésirable potentiel dû à une stimulation excessive des récepteurs de la sérotonine sau niveau du SNC en raison d’une accumulation aberrante de sérotonine. Cela est souvent dû à une surdose accidentelle ou intentionnelle d’un ou plusieurs médicaments augmentant la sérotonine, comme éventuellement certains compléments alimentaires à base de 5-HTP comme avec la plante griffonia.
🔗 Revmed. 2012 – Syndrome sérotoninergique

➥ Réponses aux antidépresseurs ISRS

Les antidépresseurs ont une connotation généralement négative auprès du grand public. Leur image ne cesse de se détériorer, la faute à des publications peu rigoureuses sur le rôle de la sérotonine dans la dépression et à de relais médiatiques avides de sensationnel. La réponse aux antidépresseurs ISRS dans le cadre de l’anxiété chronique et des troubles dépressifs sévères est souvent bonne, si le diagnostic de déficit en sérotonine est correct. Les patients qui ne répondent pas totalement aux ISRS ont généralement des problèmes de faible synthèse d’histamine, de dopamine, noradrénaline, ou encore des carences en vitamines B (folates, B3 etc.).
🔗 J Child Adolesc Psychopharmacol. 2023 – A Multicenter Double-Blind, Placebo-Controlled Trial of Escitalopram in Children and Adolescents with Generalized Anxiety Disorder
🔗 Int Clin Psychopharmacol. 2021 – The efficacy of escitalopram in major depressive disorder: a multicenter randomized, placebo-controlled double-blind study
🔗 J Clin Psychiatry. 2020 – Escitalopram in Adolescents With Generalized Anxiety Disorder: A Double-Blind, Randomized, Placebo-Controlled Study
🔗 J Allergy Clin Immunol Pract. 2018 – A Randomized, Double-Blind, Placebo-Controlled Trial of Escitalopram in Patients with Asthma and Major Depressive Disorder
🔗 Eur Neuropsychopharmacol. 2016 – Efficacy of escitalopram in the treatment of social anxiety disorder: A meta-analysis versus placebo

Une carence en niacine peut causer des troubles neuropsychiatriques via un mécanisme métabolique (déficit en NAD/NADP, dysfonction mitochondriale) et non principalement via un déséquilibre sérotoninergique. Une action déséquilibrée sur la neurotransmission avec un ISRS pourrait aggraver certains symptômes, notamment cognitifs ou anxieux en cas de carence en B3.

Recommandation clinique (National Institute for Health and Care Excellence, NICE, 2022)
– encourage le dépistage des carences nutritionnelles dans les cas de dépression résistante au traitement, notamment en vitamines B (niacine, B12, folates). NICE Guidelines
– le traitement avec ISRS doit être réévalué en cas de non amélioration ou d’aggravation.

La vortioxetine (Brintellix) représente une alternative potentiellement pertinente aux ISRS en cas de non réponse, après avoir exclut un déficit en niacine.
🔗 PCN Rep. 2023 – Vortioxetine as a potential alternative for patients with escitalopram-induced jitteriness/anxiety syndrome: A report of three cases
🔗 J Affect Disord. 2018 – The effects of vortioxetine on cognitive dysfunction in patients with inadequate response to current antidepressants in major depressive disorder: A short-term, randomized, double-blind, exploratory study versus escitalopram

➠ Les IRSN

Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSN) sont une classe d’antidépresseurs qui agissent en augmentant dans le cerveau deux neurotransmetteurs importants, la sérotonine et la noradrénaline, ce qui entraîne une réduction des symptômes de la dépression et de l’anxiété. La venlafaxine (Effexor) et la duloxétine (Cymbalta) sont des exemples d’IRSN. Ils sont utilisés dans le traitement de la dépression, des troubles anxieux et de la douleur chronique, en particulier la douleur nerveuse. Il est important de noter que l’efficacité des IRSN dans le traitement de la dépression est quelque peu incertaine et que la prise de ces médicaments peut avoir divers effets secondaires.

CaractéristiqueDuloxétine (Cymbalta)Venlafaxine (Effexor)
ClasseIRSNaIRSNa
Cibles principalesSérotonine (5-HT) + Noradrénaline (NA)Sérotonine (5-HT) + Noradrénaline (NA)
AffinitéBloque la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline de façon assez équilibrée dès les doses thérapeutiques.Augmente surtout la sérotonine à faible dose ; l’effet sur la noradrénaline devient marqué seulement à dose plus élevée.
Effet sur la dopamineLégère inhibition de la recapture de la dopamine dans certaines régions cérébrales (préfrontal), mais indirecte.Même chose, mais plutôt à forte dose.
Indications clésDépression, anxiété généralisée, douleur neuropathique, fibromyalgie.Dépression, anxiété, troubles paniques ; parfois douleur neuropathique.
Profil d’effets secondairesNausées, sécheresse buccale, constipation, sudation, possible hausse modérée de la tension.Nausées, agitation, sudation, plus de risque d’hypertension à haute dose.

➥ La venlafaxine

La venlafaxine est classée comme « inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSN) ». Les indications approuvées pour la venlafaxine incluent dépression majeure, trouble d’anxiété généralisée, trouble panique et trouble d’anxiété sociale. La venlafaxine est une option possible dans les dysthymies, notamment si les ISRS sont inefficaces. La venlafaxine est l’un des médicaments les plus prescrits dans le traitement de la dépression résistante aux inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine.
🔗 StatPearls. 2024 – Venlafaxine
🔗 Curr Med Res Opin. 2017 – A meta-analysis of the efficacy of venlafaxine extended release 75-225 mg/day for the treatment of major depressive disorder
🔗 Int Clin Psychopharmacol. 2019 – Efficacy of venlafaxine extended release in major depressive disorder patients: effect of baseline anxiety symptom severity

⚠️ Précautions dans les troubles cyclothymiques

Bien que la venlafaxine puisse être efficace dans le traitement de la dysthymie, son utilisation dans les troubles cyclothymiques doit être envisagée avec prudence. Les patients atteints de troubles cyclothymiques présentent des fluctuations d’humeur fréquentes, et l’administration d’antidépresseurs tels que la venlafaxine peut parfois induire un passage à la phase hypomaniaque ou maniaque. Il est donc essentiel d’évaluer soigneusement le profil clinique du patient et de surveiller étroitement l’évolution de l’humeur lors de l’utilisation de la venlafaxine.

Mécanisme d’action

Des études expérimentales (principalement animales) ont montré que la venlafaxine peut augmenter l’expression de deux enzymes :
TPH (tryptophane hydroxylase) → enzyme limitante de la synthèse de la sérotonine, convertit le tryptophane en 5-hydroxytryptophane.
TH (tyrosine hydroxylase) → enzyme limitante de la synthèse de la dopamine et de la noradrénaline, convertit la tyrosine en L-DOPA.
Il s’agirait d’adaptations neuroplastiques et non d’un effet direct du médicament sur ces enzymes.
Concernant l’IDO (indoleamine-2,3-dioxygénase), quelques études animales ont montré que la venlafaxine ne modifie pas la surexpression d’IDO dans l’hippocampe dans certains modèles de stress contrairement à certains antidépresseurs ISRS dans certains modèles.
🔗 Mol Med Rep. 2019 – Antidepressant effect of venlafaxine in chronic unpredictable stress: Evidence of the involvement of key enzymes responsible for monoamine neurotransmitter synthesis and metabolism
🔗 Neuroreport. 2009 – Antidepressant mechanisms of venlafaxine involving increasing histone acetylation and modulating tyrosine hydroxylase and tryptophan hydroxylase expression in hippocampus of depressive rats
🔗 Drugs. 1995 – Venlafaxine. A review of its pharmacology and therapeutic potential in depression

Effets indésirables

Les effets secondaires de la venlafaxine comprennent les nausées, la sédation, les vertiges, la sécheresse de la bouche et la transpiration, une rétention urinaire ainsi que des dysfonctionnements sexuels. En cas d’association avec d’autres antidépresseurs, un syndrome sérotoninergique peut survenir. Comme avec les antidépresseurs ISRS, des troubles sexuels peuvent survenir du fait probablement de l’augmentation des taux de sérotonine et de la diminution des taux d’histamine.
Prim Care Companion CNS Disord. 2023 Urinary Retention: An Uncommon Adverse Effect of Venlafaxine

À des doses élevées (plus de 200 mg/jour), la venlafaxine peut provoquer une hypertension artérielle, et des effets comportementaux de type amphétamine ne sont pas à exclure.
🔗 Hum Psychopharmacol. 2015 – Venlafaxine as the ‘baby ecstasy’? Literature overview and analysis of web-based misusers’ experiences
🔗 Case Rep Psychiatry. 2014 – Accelerated hypertension after venlafaxine usage
🔗 J Psychopharmacol. 2004 – Tolerability of high-dose venlafaxine in depressed patients

➠ Les autres indications des ISRS et IRSN

Les essais sur les ISRS montrent qu’il s’agit de médicaments extrêmement polyvalents, fournissant des preuves encourageantes lorsqu’ils sont utilisés par des experts pour traiter différentes affections en dehors des troubles de l’humeur. 
🔗 Curr Neuropharmacol. 2022 – Off-label Uses of Selective Serotonin Reuptake Inhibitors (SSRIs)

IndicationNiveau de preuveCommentaire synthétiqueRéférences clés
Utilisations off-label générales des ISRS (douleurs, troubles anxieux non-classiques, certaines douleurs neuropathiques, etc.)ModéréRevue large recensant de nombreuses utilisations hors AMM ; qualité des preuves variable selon l’indication.Curr Neuropharmacol 2022 (revue off-label). PMC
TDAH (venlafaxine / autres SNRI, pédiatrie)Faible → ModéréQuelques essais (petits, courts) et revues systématiques suggèrent un effet possible ; pas de place en 1ʳᵉ ligne (les stimulants restent la référence). Préférence si comorbidité anxieuse/dépressive.Ann Pharmacother / revues SNRI (extraits) ; systematic review Venlafaxine 2013. PubMed+1
Troubles du spectre autistique (TSA) — ISRS / venlafaxineFaible / HétérogèneCertains essais et revues montrent amélioration d’anxiété et de comportements répétitifs pour certains ISRS (citalopram, fluoxetine, sertraline), mais résultats contradictoires et risques d’agitation ; données sur venlafaxine très limitées.J Clin Psychiatry 2006 (revue SSRIs en autisme) ; petites études venlafaxine. PubMed+1
Syndrome de l’intestin irritable (IBS)Élevé → ModéréMéta-analyses montrent que les antidépresseurs (dont certains ISRS/SNRI et surtout tricycliques à faible dose) réduisent les symptômes d’IBS — qualité des études variable.Am J Gastroenterol 2019 (meta-analysis). Lippincott
Éjaculation précoceÉlevéLes ISRS sont une option bien établie (dapoxétine en particulier pour usage on-label) ; revues/Cocharne montrent bénéfice significatif vs placebo.Revue/Cochrane / analyses (revue off-label SSRIs). PMC+1
Céphalées de tension (prévention)Conflit / InsuffisantRevues (Cochrane) n’ont pas montré d’avantage clair des SSRI/SNRI vs placebo ou amitriptyline ; preuves insuffisantes pour recommander.Cochrane 2015 (SSRIs/SNRIs for tension-type headache). PubMedCochrane Library
Migraine (prévention) — incluant vestibular migraineConflit / Modéré (spécifique)Pour migraine en général, preuves globalement négatives ou mixtes ; toutefois quelques études/syst rev suggèrent un bénéfice possible des SNRI (ex. venlafaxine) pour la migraine vestibulaire ou cas sélectionnés (petites RCTs). Preuve insuffisante pour recommandation large.Reg Anesth Pain Med 2020 (SNRIs meta-analysis) ; Cochrane 2015 (SSRI/SNRI migraines). rapm-bmj-com.bibliotheek.ehb.beCochrane Library

➥ Le TDAH

Des petits essais et quelques revues (enfants/adolescents) montrent une amélioration possible des scores ADHD avec la venlafaxine dans certaines études, mais le corpus est limité (peu d’essais contrôlés, petit effectif). Les revues systématiques concluent à une utilité préliminaire mais insuffisante pour en faire un traitement de première ligne ; les stimulants (méthylphénidate, amphétamines) restent la référence clinique.
🔗 Ann Pharmacother. 2024 – Use of serotonin norepinephrine reuptake inhibitors in the treatment of attention-deficit hyperactivity disorder in pediatrics
🔗 Rev Recent Clin Trials. 2013 – Efficacy and adverse effects of venlafaxine in children and adolescents with ADHD: a systematic review of non-controlled and controlled trials

➥ Les troubles du spectre de l’autisme

Les ISRS pourrait aider certains patients (surtout pour l’anxiété ou l’impulsivité), mais ils ne sont pas universellement efficaces chez tous les autistes, et pourraient provoquer des effets indésirables (agitation, désinhibition).
🔗 Prog Neuropsychopharmacol Biol Psychiatry. 2016 – Using venlafaxine to treat behavioral disorders in patients with autism spectrum disorder
🔗 J Clin Psychiatry. 2006 – Selective serotonin reuptake inhibitors in autism: a review of efficacy and tolerability

➥ Le syndrome de l’intestin irritable

Les antidépresseurs sont généralement efficaces pour réduire les symptômes chez les patients atteints du syndrome de l’intestin irritable.
🔗 Can Fam Physician. 2020 – Antidepressants for irritable bowel syndrome
🔗 Am J Gastroenterol. 2019 – Effect of Antidepressants and Psychological Therapies in Irritable Bowel Syndrome: An Updated Systematic Review and Meta-Analysis

➥ L’éjaculation précoce

Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) sont les plus couramment utilisés comme antidépresseurs pour traiter cette maladie.
🔗 World J Mens Health. 2022 – Selective Serotonin Re-Uptake Inhibitors for Premature Ejaculation in Adult Men: A Cochrane Systematic Review

➥ Les céphalées de tension

Les ISRS et les IRSN ont été évalués pour la prévention des céphalées de tension. Les résultats ne sont pas toujours concluants.
🔗 Cochrane Database Syst Rev. 2015 – Selective serotonin reuptake inhibitors (SSRIs) and serotonin-norepinephrine reuptake inhibitors (SNRIs) for the prevention of tension-type headache in adults

➥ La migraine

Certaines formes de migraine (vestibular migraine) peuvent bénéficier de la venlafaxine dans des études petites, mais pour la prophylaxie migraineuse générale la preuve est insuffisante.
🔗 Reg Anesth Pain Med. 2020 – Serotonin-norepinephrine reuptake inhibitors for the prevention of migraine and vestibular migraine: a systematic review and meta-analysis
🔗 Laryngoscope. 2016 – Propranolol and venlafaxine for vestibular migraine prophylaxis: A randomized controlled trial
🔗 Cochrane Database Syst Rev. 2015 – Selective serotonin reuptake inhibitors (SSRIs) and serotonin-norepinephrine reuptake inhibitors (SNRIs) for the prevention of migraine in adults

👉 Les antidépresseurs en résumé

🔗 Pour en savoir plus

  1. Institut du cerveau – Qu’est-ce que la sérotonine ?
  2. Inserm. 2016 – Dépression : la piste inflammatoire se précise
  3. Conférence FondaMental Lucile Capuron – Les cytokines chantent le blues

🔗 Ressources scientifiques

  1. StatPearls. 2023 – Antidepressants

Les articles en ligne ont pour finalité d’aider les gens à mieux comprendre leur maladie, à permettre aux patients de bénéficier d’une meilleure prise en charge avec leur médecin traitant. Assurez-vous de collaborer avec vos professionnels de santé médecins et pharmaciens pour surveiller votre santé et vos traitements. Rémy Honoré ne pourra être tenu pour responsable de l’usage qui sera fait des contenus de ce site. Rémy Honoré ne diagnostique ni ne traite aucune maladie en ligne.


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